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Category CHRONIQUE
Créer sa marque, la to-do list

La décision de fonder une marque est un moment exaltant.

Ça n’arrive pas à tout le monde, ni tous les quatre matins, parce que ça nécessite l’alignement rarissime de 3 planètes dans le ciel d’une vie : la créativité, la détermination et l’optimisme.

La créativité parce qu’il faut l’idée.

La détermination parce qu’il faut batailler.

L’optimisme parce ce que pour se lancer dans une telle aventure, il faut friser l’inconscience.

Le moment qui précède la décision de fonder sa marque est marqué par un désir latent enfin assumé, une furieuse envie de changement, un besoin lancinant de créer, et un bouillonnement jubilatoire. Bref, un état d’exaltation qui est somme toute assez rare, un peu comme une rencontre amoureuse ou l’arrivée d’un enfant.

« It’s ok to be a little bit obsessed by jewelry »

Photo Instagram Philippe Airaud

 

Ça m’est arrivé à quarante ans et des poussières, j’ai lancé ma marque de bijoux dans la fleur de l’âge on va dire, ce qui ne m’a pas empêchée de me planter. Et si j’en parle aujourd’hui, c’est bien sûr parce que je reprends à mon compte ce mantra star du développement personnel qui veut que « l’échec est le fondement de la réussite », mais aussi parce ce que je pense que cette expérience qui m’a beaucoup apporté mérite d’être partagée.

 

Si vous me lisez c’est que vous êtes passionné de bijoux, artisan, ou que vous travaillez de près ou de loin dans ce domaine. Vous avez peut-être déjà fondé votre marque, ou l’idée de le faire un jour trotte dans votre tête.

Je partage avec vous mon vécu et toute l’expérience que j’ai emmagasinés depuis quelques années en accompagnant des marques dans leur parcours. A glaner ou à laisser, 7 trucs à savoir quand on fonde sa marque de bijou.

1 – Savoir bien s’entourer

Photo Instagram Philippe Airaud

 

Il y a deux sortes d’entrepreneurs : ceux qui créent puis cherchent à rentabiliser leur création, et ceux qui découvrent un besoin latent puis travaillent à développer et promouvoir le produit (ou service) qui y répond.

En d’autres termes, il y a les créateurs-inventeurs d’un côté de l’axe et les génies du business à l’autre extrême. Entre ces deux pôles, il y a une myriade de profils.

Quand on fonde sa marque, il est crucial d’être lucide sur ses compétences. Vous allez me dire que l’idéal, c’est posséder à parts égales les dons de créativité et ceux de business développement. En pratique, ce profil hybride qui est un peu le mien a son corolaire. Être relativement bon dans les deux, c’est aussi ne pas être excellent dans l’un ou l’autre domaine, il vaut mieux le savoir et en tirer parti.

On est forcément meilleur en création ou en business, et pour combler le déficit, si on veut grandir, l’enjeu devient rapidement de trouver les bonnes personnes pour s’entourer !

2 – Savoir bien se connaitre

Photo Instagram Philippe Airaud

 

Connaitre ses compétences c’est bien, mais savoir ce que l’on aime faire et ce qui nous donne de l’urticaire, c’est aussi fondamental. Parce qu’on ne fait très bien que ce qu’on aime. Et puis pour émerger sur un marché compétitif, il vaut mieux adorer ce que l’on fait, parce que ça va bouffer une grande partie de sa vie.

Ce point 2 est proche du point 1, mais il est plus subtil, et on a tendance à le négliger dans le moment d’exaltation du lancement de la marque. Un peu comme quand on est amoureux… (Vous vous rappelez l’adage « L’amour rend aveugle mais le mariage lui rend la vue » ?). Si vous avez la bougeotte, être enfermé dans votre boutique 10h par jour vous rendra dingue. Vous en ouvrirez une le jour où vous aurez les moyens d’avoir une responsable de boutique, ou vous n’en ouvrirez jamais.

Si les papiers vous font peur (la délicieuse Catherine Levy de Dorette m’avait lâché ça un jour, tellement vrai…), vous vous prendrez dès le départ un bras droit doué pour l’administratif, les tableaux exel, et la compta.

Si vous ne supportez pas de vendre vos propres créations, vous prendrez un alter ego qui est le roi/la reine de la vente, qui vous boostera lors des showrooms et développera votre réseau.

Si vous ne savez pas dessiner, vous ferez des crobards sur Power Point qui était votre logiciel fétiche du temps de votre job marketing (recette Sophie d’Agon) ou sur un bout de papier (recette Caroline de Benoist), mais vous trouverez l’atelier ou l’artisan qui comprend votre regard sur le bijou.

Et ça m’amène au point 3 !

3 – Savoir trouver le bon atelier

Photo Selim Mouzannar

 

C’est bien d’avoir des idées, mais il faut produire. Or, à moins d’être un artisan hyper doué de ses mains (Flav Joaillerie, Amélie Viaene, Agop Castany, Myrtille Beck, Yves Gratas) ou d’être une maison qui a son propre atelier (Selim Mouzannar), la plupart des marques de créateurs sont nées d’un dessin ou d’une idée qui reste à être entièrement réalisée.

Au début des années 2000, on est tous partis fabriquer à Jaïpur ou à Bangkok. L’Inde et la Thaïlande avaient l’avantage d’être des pays avec une forte culture joaillière liée à leur situation internationale de marché aux pierres précieuses, et une main d’œuvre à faible coût.

Mais depuis, les problèmes de suivi de production, les frais de douane, les préoccupations éthiques, écologiques et la crise du covid ont remis la proximité géographique de la production au centre des priorités.

Le Portugal et l’Italie sont les deux pays d’Europe plébiscités en ce moment pour leur réactivité et leur savoir-faire. Il ne reste alors qu’à trouver le bon atelier et à ancrer son partenariat dans un creuset de valeurs commune et de loyauté.

Parce qu’il faut le savoir, changer d’outil de production, c’est un nightmare pour une marque, voire une mise en danger tragique en cas de rupture de production !

4 – Savoir communiquer

Photo Instagram Philippe Airaud

 

Avoir une belle idée créative n’est pas toujours suffisant pour émerger. Il faut communiquer. Combien de jeunes créateurs hyper doués ai-je vu rester confidentiels ? Ce n’est pas grave quand ils sont ancrés dans un lieu et qu’ils ont une clientèle locale qu’ils fidélisent (Yves Gratas, Myrtille Beck).

Mais le bijou est par essence un produit qui se doit de susciter le désir, et le désir passe aujourd’hui avant tout par le digital, qu’on le veuille ou non. Le talentueux designer Philippe Airaud qui a dessiné pour de grandes maisons de joaillerie et qui signe les collection de la belle marque éthique DFLY a posté récemment ce petit dessin hilarant mais tellement vrai ! Sans les réseaux sociaux, un créateur prend le risque de ne pas être vu.

S’il a un talent fou, il aura peut-être la chance de croiser un prescripteur du marché comme Stéphanie Roger de White Bird, mais un compte Instagram séduisant et un engagement digital fort assureront plus surement son rayonnement et son chiffre d’affaire…

Même si elles fréquentent les salons professionnels, les acheteuses du Bon Marché, du Printemps ou des Galeries Lafayette ont l’œil rivé sur leur Instagram, et si la marque n’a pas passé ce cap, elle restera forcément bloquée dans son développement.

Les jeunes marques digitales, comme Sophie d’Agon, Leïla Buecher ou Daphine l’ont d’ailleurs bien compris. Elles ont tout misé sur le digital et le BtoC (Business to Customer) plutôt que d’investir sur le BtoB (Business to Business) et ça leur réussit plutôt bien.

Elles maitrisent aujourd’hui leur relation client, et restent très prudentes quant à la distribution wholesale.

Alors aujourd’hui, ne pas avoir un point de vente vitrine quand on commence ce n’est pas si grave, mais ne pas avoir un engagement fort sur les réseaux sociaux, ça oui, c’est un vrai problème !

5 – Savoir trouver sa place

Photo Instagram Philippe Airaud

Il faut être désirable, tu parles d’un pitch ! Comme il faut être audacieux, éthique, écologique inclusif, et engagé…

En communication, les lieux communs ont la vie dure, le temps d’une mode. Mais tout ça c’est du bla-bla, parce que si tout le monde est désirable, audacieux, éthique, écolo, inclusif et engagé, tout le monde sera pareil, la nuit tous les chats sont gris…

Concrètement, qu’on soit un créateur pur ou un entrepreneur pur, il faut savoir trouver sa place. Celle qu’on mérite, et j’en reviens au point 1, celle qui vous convient, au point 2, celle qui vous distingue, c’est l’objet du point 5. Comment trouver sa singularité ? Tout simplement en se demandant pourquoi on fait ce qu’on fait, parce que  si toutes les marques font des bijoux, elles le font toutes pour des raisons différentes, et d’une manière différente.

Je reprends l’exemple de Sophie d’Agon qui est un modèle du genre. Quand elle est arrivée sur le marché il y a 5 ans, la concurrence était déjà rude. Elle avait la double passion du bijou ancien et des pierres de couleurs, alors elle a réfléchi, fait une étude de marché et bâti son modèle. Au final, si sa marque emprunte à la grammaire stylistique de marques préexistantes (la fraicheur et les pierres de couleur de Dorette ou de Céline Daoust), son traité est différent : elle ne fait que des séries et pas de la pièce unique, pas de tourmaline mais des saphirs de couleur, pas de talismans mais des pièces au twist vintage, des diamants atypiques mais toujours calibrés, de la taille princesse en pierre de centre plutôt que de la taille brillant.

Bref, elle a défini dès le départ sa singularité qu’elle appelle l’ADN de la marque et elle s’y tient, ce qui m’amène au point 6 !

6 – Savoir être constant, patient, persévérant

Photo Instagram Philippe Airaud

La constance, la patience et la persévérance sont de belles qualités qui servent les plus avisés.

Quand on a défini sa route, on s’y tient. Faire du bijou fantaisie est un métier différent de la joaillerie et passer de l’un à l’autre est périlleux, parce qu’on change tout son modèle, de sa distribution à son outil de fabrication.

Monter en gamme est presque aussi périlleux, le vermeil et l’or semblent proches, mais idem, ni la production, ni la distribution, ni la législation douanière ne sont les mêmes. Monter en gamme, c’est souvent repartir de zéro.

 Les marques qui sont là depuis longtemps ont trouvé leur voie et s’y tiennent, en voici quelques exemples :

Le bijou mode plaqué or distribué par des revendeurs en France et à l’international pour Louise Hendricks

 Le bijou fantaisie couture distribué dans sa boutique en propre et quelques belles vitrines pour IMAI.

Un atelier boutique ou tout est fait sur place pour la marque artisanale de joaillerie fine Monsieur.

La pièce unique et une distribution hyper sélective pour Dorette.

Deux boutiques prestigieuses en propre pour la joaillerie d’inspiration indienne de Marie-Hélène de Taillac

Une galerie d’art en propre et quelques revendeurs triés sur le volet de 5 Octobre.

Les pièces uniques sur mesure de haute joaillerie imaginées dans son showroom privé pour Walid Akkad.

Chacun sa route, chacun son chemin, passe le message à ton voisin !

 
 

7 – Savoir se raconter

Photo Instagram Philippe Airaud

Se connaitre c’est bien, encore faut-il savoir se raconter… Certains le font à merveille naturellement. Il a suffi que Marie Lichtenberg enchaine à son cou tous ses loquets pour qu’on adopte son style, sa charmante impertinence et son histoire.

Il a suffi que Charlotte Chesnais transforme ses oreilles et mains en objet de désir pour qu’on se jette toutes sur ses précieuses volutes futuristes.

Mais certains ne savent pas mettre en valeur leur singularité. Leur talent mérite d’être révélé par quelqu’un qui les fera briller. Et c’est là que j’interviens, parce que quand je raconte l’histoire du créateur, c’est aussi la singularité du bijou que je fait briller.

Repérer les diamant cachés et révéler leur éclat, c’est ça finalement, mon truc à moi !

 
 

Merci à tous les créateurs cités dans ce post de m’avoir fait confiance et de m’avoir raconté de leur parcours.

Merci à Philippe Airaud dont l’Instagram est une source d’inspiration permanente et à qui j’ai piqué plein d’images.

Merci à Selim Mouzannar pour la photo de son nouvel atelier à Beyrouth.

Texte Sylvie Arkoun

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