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Category PORTRAIT
Le French Aging selon Julie Exertier

Quand Constance m’a dit de rencontrer Julie Exertier, je l’ai crue sur parole, parce que je lui fais confiance. Il y a des gens comme ça, je suis leur avis les yeux fermés, leur instinct est en phase avec le mien.

Je travaille avec Constance et son mari Sylvain de l’agence Persona Editions depuis maintenant 3 ans, ces deux là forment un tandem de choc pour gérer la communication de marques de luxe ou life-style. Leurs antennes détectent parfaitement les nouvelles tendances, pas forcément au sens de ce qui est à la mode, mais plus de ce qui va nous toucher.

Je cherchais à interviewer une entrepreneuse créative et atypique, pas forcément dans le domaine des bijoux et Constance m’a immédiatement dit :

« Va voir Julie, elle a monté une marque de cosmétique naturelle, elle a une personnalité originale, tu verras, elle porte un message différent ! »

En regardant le site Exertier, Trésor des Alpes, la marque éponyme montée par Julie, j’ai d’abord vu une énième marque de soin revendiquant des ingrédients de qualité et une éthique naturelle. Puis j’ai visionné deux vidéos d’elle, et j’ai été frappée par son enthousiasme : Une histoire de famille savoyarde, une grand-mère un peu gourou dans son village qui lui raconte la légende d’une orchidée des Alpes aux propriétés cosmétiques extraordinaires. J’ai aussi aimé son ton d’une désarmante franchise, à l’opposé des promesses de rajeunissement délirantes des grandes marques de soin.

On a réussi à se caler un rendez-vous la deuxième semaine des vacances de février, Julie m’a avoué qu’elle était un peu plus au calme car sans enfants, léger espace de respiration dans un agenda de maman entrepreneur surchargé. Nous nous sommes retrouvées dans son appartement sous les toits du 9ème arrondissement, dans son salon cosy baigné par une douce lumière d’hiver.

Je lui ai présenté Delphine Jouandeau, ma nouvelle complice photographe qui va dorénavant m’accompagner dans les tribulations des Précieuses, Julie connait le travail de Delphine qu’elle apprécie. Ouf, je sens qu’elle décompresse un peu, elle porte un joli chemisier au look rétro sur un jean brut, de ravissantes boucles d’oreilles Isabelle Marant, sa chaine Cartier au poignet qui ne la quitte jamais, mais elle n’a pas eu le temps de finir son maquillage, elle s’excuse d’avoir eu une matinée plus chargée que prévue, elle disparaît pour se remettre un coup de gloss.

Nous nous installons dans le confortable canapé vintage pendant que Delphine dispose élégamment les produits Exertier sur la table basse.

Je me lance et demande à Julie de me raconter son parcours. Elle s’exclame :

« Mon parcours ? C’est une longue histoire, très longue, parce que je fais plein de trucs, alors c’est compliqué… »

Dans cette première phrase, il y a l’expression du caractère bouillonnant de Julie. Ce qu’elle me raconte ressemble plus à une épopée truffée de hasards et de rencontres qu’à la construction raisonnée d’une carrière de business women. Parce qu’on peut dire que Julie a touché à tout, littéralement.

Quand elle débarque à Paris de sa Savoie natale, c’est pour accomplir son rêve d’enfant, elle veut être styliste. Elle entre à Esmod et se rend compte qu’entre ses rêves et la réalité il y un énorme gap. Ses talents manuels sont proches de zéro, elle abandonne pour se replier sagement sur une école de commerce.

Fraichement diplômée, elle se lance à 25 ans dans l’aventure de l’entreprenariat et créé la première marque de mode pour les grandes taille, elle  défend le concept avant-gardiste du « Body positive ». Mais elle est trop jeune, trop inexpérimentée et puis elle est arrivée trop tôt, avant le formidable accélérateur des réseaux sociaux. Après 5 ans d’une aventure intense mais épuisante, malgré le potentiel, elle décide d’arrêter.

Elle rencontre alors Marilou Berri qui lui propose d’être sa styliste.

L’expérience est un succès, les deux jeunes femmes s’entendent bien et Julie a une vraie vision du style. Un agent lui présente alors Mélanie Laurent qui vient de tourner Inglourious Basterds avec Brad Pitt, elle est alors l’actrice française la plus désirée du moment.

Les yeux de Julie pétillent quand elle me parle de cette parenthèse épique, la folie du festival de Cannes, le costume blanc qu’elle fait porter à Mélanie pour la montée des marches qui fera le tour des rédactions, mémorable…

Pour autant Julie ne se voit pas costumière toute sa vie, elle a trop d’idées en tête, elle sent qu’elle a besoin de rassembler un peu ses talents, de les structurer. Elle décide de reprendre des études dans le prestigieux MBA de luxe de l’Essec. Elle me regarde malicieusement :

« On m’avait prévenu que c’était dur, ça ne me faisait pas peur, je suis plutôt une bosseuse, mais là je me suis pris une claque, je me suis pas lavé les cheveux pendant trois mois… »

C’est ce truc qui me rend Julie sympathique. Elle ne se goberge pas d’avoir fait l’Essec, non, elle avoue qu’elle en a bavé, qu’elle a découvert plein de sujets nouveaux et exigeants et ça été dur. Elle est cash, elle ne pose pas, elle balance ses galères avec humour, un peu à l’inverse de toutes les beautiful lifes qui trustent les réseaux sociaux avec leur exaspérante perfection.

Julie est une vraie personne, qui a roulé sa bosse par monts et par vaux, qui a eu beaucoup de succès, mais aussi des échecs. Et sa force, c’est la sincérité avec laquelle elle en parle, elle regarde tout de front, elle accepte, elle surmonte, elle avance. C’est un véritable baume pour tous ceux et celles qui croient aux miracles, son discours de vérité va aussi devenir l’ADN de sa marque, un way of life, un gage de confiance et de sécurité.

Après le studieux épisode de l’Essec, Julie se range dans des missions marketing, la première pour les ateliers Chanel, une deuxième dans une startup de maroquinerie, mais elle n’a pas les coudées franches, elle s’ennuie vite et elle est rattrapée par la planète people.

Michèle Laroque lui propose de l’accompagner dans sa tournée pour s’occuper de ses costumes, elle ne peut pas résister, parce que Michèle est son idole, qu’elle a de nouveau besoin de respirer l’air de liberté, et que dans son sillage, il y a toute une bande d’artistes extraordinaires qu’elle admire, de Pierre Palmade à Alex Lutz en passant par Camille Cottin, dont elle connaitra les débuts.

Je doit regarder Julie comme un bête curieuse.

Comment fait-on pour passer sans l’ombre d’une hésitation de boulots de marketing sérieux à des missions farfelues d’intermittents du spectacle ? Il me semble que la majorité des personnes choisissent leur camp assez jeune : la vie raisonnable ou la vie de bohème, la cigale ou la fourmi, la raison ou la création, la famille ou la carrière. Comme pour prévenir l’objection, Julie s’exclame avec jubilation :

« Michèle Laroque, c’est mon mentor. Elle m’a révélée à moi-même en m’expliquant qu’on peut tout avoir. »

Moi je trouve qu’avoir Michèle Laroque comme mentor, c’est la classe absolue. Il y a dans l’admiration pour une personnalité charismatique un formidable accélérateur d’énergie. Je me demande même si toute réussite n’est pas liée à l’existence d’un mentor. N’avons-nous pas tous besoin d’une personne extérieure admirée pour nous révéler à nous même ?

Mais Julie se veut indépendante, elle a besoin de trouver sa propre voie, dans laquelle elle puisse exprimer les multiples facettes de sa personnalité. Elle a besoin de résoudre des problèmes d’organisation, mais elle a besoin de créer. Elle a besoin de défendre une cause éthique, mais elle a aussi besoin de gagner de l’argent. Elle a besoin de développer une marque mais elle a aussi besoin de partager ses expériences. Forte de ce que lui a dit son mentor, maintenant, elle veut tout.

C’est à ce moment que les planètes vont s’aligner pour Julie, autour d’une de ses passions de toujours, la beauté.

« J’ai toujours été une tarée de la beauté, chez moi, c’est le musée du soin. Quand j’étais jeune, j’essayais tout. Il suffisait que je dise à une vendeuse de Sephora que je me trouvais mauvaise mine pour que je ressorte avec 200 € de produits de soins. »

A force, elle qui a une peau magnifique finit par souffrir de réactions allergiques. Elle ne supporte plus ni les crèmes ultra dosées en molécules chimiques, ni les huiles essentielles bio. Elle est obligée de mettre sa peau à la diète, et c’est pendant ce passage d’ascétisme cosmétique forcé qu’elle a l’idée d’une ligne de soin qui emprunterait une voie nouvelle, ni forcément anti-age ni forcément bio, mais d’une exigence absolue en terme d’innocuité et de naturalité.

Cette envie coïncide avec la légende de l’orchidée des Alpes de sa grand-mère et de sa rencontre avec son voisin savoyard, ancien PDG d’Avène, qui croit en son projet, et lui propose de l’accompagner. Elle embarque aussi son beau-père, ancien cadre de Sanofi dans l’aventure de la recherche, ils partent à la recherche de l’orchidée rare. Deux ans seront nécessaires pour mettre au point des formules maison, conciliant l’exigence d’une galénique aussi pointue que les plus grandes marque de luxe avec leur objectif de naturalité de 98% de chaque formule.

Pari gagné pour Julie, la marque Exertier, trésor des Alpes voit le jour en 2017, c’est le début d’une nouvelle aventure entrepreneuriale où elle est enfin auteur, chef d’orchestre, gestionnaire, manager et porte-parole charismatique d’une cosmétique naturelle et d’une méthode du bien vieillir à la française que nous envie le reste du monde.

En trois ans, la marque a convaincu 30 des meilleures pharmacies françaises et quatre points de vente en Corée, le pays roi de la cosmétique. Elle a ouvert trois spas en partenariat avec de prestigieux hôtels de sa chère vallée de la Tarentaise, notamment Le refuge de Solaise à Val d’Isère (mon rêve !!!), les Airelles de Courchevel et Le petit hôtel confidentiel de Chambéry. Trois lieux ou elle a développé des protocoles de soins inédits et fabuleux qui lui permettent d’avoir un vrai contact avec sa clientèle.

Je suis bluffée par la détermination de Julie, mais à force de prendre des notes, je ne me suis toujours pas plongée dans ses produits.

Nous passons donc à la séance « dégustation », elle me fait découvrir ses deux soins stars à base de la fameuse Or de l’orchidée, les textures et les odeurs sont irrésistibles, c’est délicieusement fondant, la peau de crocodile de mes mains absorbe la crème et devient instantanément plus lisse.

Même expérience avec l’Huile des cimes dont Julie laisse tomber une goutte couleur de miel sur le dos de ma main, ça sent divinement bon, l’effet glow est immédiatement addictif.

Julie m’explique que la qualité galénique extraordinaire de ses crèmes et huiles de soin est son premier atout. Les essayer c’est les adopter, ses clientes sont hyper fidèles, elle le mesure parfaitement sur son site ou dans les boutiques où elle fidélise plus que des grandes marques. Mais la meilleure reconnaissance lui est venue des rédactrices beauté. Cette population de femmes hyper-averties et bombardées de produits cosmétiques est devenue accro des produits Exertier, il y en a beaucoup qui rachètent alors qu’habituellement elles papillonnent d’une marque à l’autre.

Dans ce marché hyper concurrentiel, Julie a réussi un tour de force. Mais elle reste prudente, elle sait que tant que le point d’équilibre n’est pas atteint, la bataille n’est pas encore gagnée. Elle sait qu’elle a face à elle des géants, le combat de David contre Golliath la galvanise :

« Je me bats tous les jours contre trop d’argent, trop d’échantillons, trop d’égéries, trop de pub. Mais les grand groupes sont déconnectés, il faut mettre de la magie dans ce qu’on fait, je crois c’est ça la clé. Moi, je fais une conférence en Chine devant un parterre de pros de la beauté, et le lendemain, je fais mes cartons. Ça apprend, j’essaye de mettre de l’attention dans toutes choses ».

Tout cela me rappelle mes années au marketing Guerlain, il y a 20 ans déjà… Julie m’explique que cela correspondait à l’ère marketing du rêve, à l’époque on faisait miroiter un élixir d’éternelle jeunesse dans un pot luxueux à 300 €. Puis ce fut le règne de la promesse anti-ride, période où des marques comme Filorga ont essayé de faire concurrence à la dermo-cosmétique et aux injections.

Aujourd’hui, Julie défend le courant de la « clean beauty » et de la transparence :

« On n’est pas là pour raconter des bobards à nos clientes. Les cosmétiques anti-ages promettaient d’effacer les rides, mais cette stratégie est dépassée, parce qu’elle n ‘a pas démontré son efficacité, pire, elle agresse la peau avec des molécules chimiques qui créent des réactions. »

Je comprends tout à fait ce discours, j’ai renoncé depuis belle-lurette à toutes les crèmes archi dosées en molécules soit-disant miraculeuses, histoire de ne pas finir avec une peau en cul de babouin. D’autant que pour le même budget, je préfère investir dans des injections raisonnables chez ma dermato esthétique, là au moins, le résultat est tangible. Julie renchérit :

« Nous on revendique le « French Aging », le bien vieillir à la française. Ça veut dire soigner sa peau, se faire du bien, pas du mal. Notre crédo, c’est « less-is-more », mais c’est aussi dire à toutes les femmes de s’accepter, de s’aimer, de ne mettre sur leur peau que ce qui lui fait du bien. »

Passer le message qu’il faut s’accepter. Je comprends que l’essence de Julie tient dans ce mot.

Savoir qui on est, comprendre comment on fonctionne, en tirer le meilleur parti, s’aimer. Et dans ce mantra, il y a bien sûr l’idée d’accepter de vieillir, un peu comme sa grand-mère, son modèle, cette vieille dame héritière des légendes de sa montagne, gourou de son village qui organise des parties de cartes avec toutes ses voisines et qui rayonne du haut de ses 90 printemps.

Tout cela raisonne évidemment en moi, parce que le concept du vieillissement nous touche à tout âge. Je l’ai ressenti par piqures de rappel depuis mes 20 ans. Mes premières pattes d’oie, ma première vergeture, ma première tache de soleil, ma première ride du lion, mon premier signe de cou-de-poulet… La conscience du vieillissement est une petite alarme intermittente, qui s’allume à certains moments de notre vie, pour nous rappeler que le processus est bien là, et qu’il va falloir faire avec.

Julie est beaucoup plus jeune que moi, mais je vois bien qu’elle est autant soucieuse que moi par l’idée de bien vieillir et par la question de savoir si on peut s’aimer à tout âge. Finalement, l’axe qui oppose la jeunesse à la vieillesse n’est-il pas complètement relatif ? Je suis moi-même une fan inconditionnelle de Jane Fonda qui a l’âge de ma mère, tout simplement parce que son rayonnement me fascine. Elle vit, elle lutte, elle s’aime, elle aime. Et c’est parce qu’elle est tout cela qu’elle me m’apparaît belle. Enfin pas que… Ses yeux bleus glacier… Oh my god !!!

D’ailleurs, Julie vient de lui consacrer une story sur son Instagram, parce que, qui mieux que Jean Fonda peut incarner le concept du bien vieillir ?

Je me lève, on pique un fou rire en parlant du conseiller beauté star des pharmacies de la Croix Bleue, un certain Guy, beau gosse bronzé au sourire ravageur, la légende dit qu’il aurait refourgué 500 € de crème de beauté à la reine d’Angleterre.

Avant de partir, je promets à Julie de devenir la prochaine ambassadrice de mon quartier sur les produits Exertier. La vérité ? Je me mets l’huile des Cimes depuis 3 jours, je suis accros.

Et c’est justement parce que la vérité en marketing c’est compliqué, que je crois au discours de Julie. Comme elle, je tourne le dos au mirage de l’éternelle jeunesse, et je vous dis avec Julie (et Sophie Calle, dont elle est une fan inconditionnelle) :

Prenez soin de vous !

PS Coté bijoux :

Julie est une modeuse qui accessoirise ses boucles d’oreilles comme les jolies Isabelle Marant qu’elle portait ce jour là. Mais pour son alliance et sa gourmette en or, elle est fidèle à Cartier, son must-du-must de la joaillerie !

Pour sa jolie chaine de cou, elle a craqué pour Lujparis.

Mon collier cœurs et mes joncs sont de la marque Daphine que j’adore depuis que j’ai rencontré Philippine Follin une des deux créatrices.

Merci à Delphine Jouandeau pour ses jolies photos.

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