« Les ventes aux enchères n’ont jamais aussi bien marché qu’en ce moment !»
Il y a des lieux mythiques dans Paris et pour moi, l’hôtel particulier du 7, rond-point des Champs-Elysées où se situe la maison de vente aux enchères ARTCURIAL en fait partie.
J’aime tout dans ARTCURIAL:
Ce lieu, carrefour entre deux avenues mythiques où mes pas m’ont menés 1000 fois.
Cet hôtel particulier à la splendeur romanesque construit au milieu du 19ème siècle par l’illustre Duc de Morny pour s’acquitter de sa rupture avec sa maîtresse officielle la belle Fanny Le Hon. Le duc de Morny, demi-frère de Napoléon III, fils de la reine Hortense et petit-fils de Talleyrand (J’ai un grand-père évêque, une mère reine, un frère empereur, et tout cela est bien naturel…), c’est pas rien quand même !
Ce nom composé deux vocations nobles, l’art et la curation.
Et cette ambiance unique de la vente aux enchères, entre liturgie d’experts, raffinement élitiste, et suspense insoutenable.
C’est au début des années 2000, moment où les commissaires-priseurs ont perdu leur monopole sur les ventes aux enchères, que la maison de vente ARTCURIAL est devenue la première des salles des ventes françaises, au côté des maisons étrangères Christie’s et Sotheby’s.
Je ne sais pas ce que représente pour vous une vente aux enchères, mais pour moi c’est un happening réservé aux collectionneurs d’art, aux milliardaires et aux personnalités interlopes recyclées dans le mécénat. Dans mon esprit, ça ressemble à la scène de la vente aux enchère dans le film mythique de Hitchock « La mort aux trousses », c’est dire la puissance de mon fantasme !
J’ai pourtant eu l’occasion de participer une fois à une vente aux Andelys. Je me souviens avoir senti mon cœur s’emballer dangereusement au moment de lever la main pour enchérir sur un lot de jolis tableaux et d’être sortie de la salle des ventes avec mon trophée, plus un poil de sec, mais totalement exaltée par le sentiment d’une victoire héroïque, un peu comme si j’avais remporté un marathon…
Si je n’ai jamais renouvelé cette prouesse, c’est parce que mon chemin n’a plus jamais croisé celui d’une salle des ventes (ce qui est dommage) et que j’avais gardé l’impression que ce type d’achat était réservé aux experts (ce qui est totalement faux).
En répondant la semaine dernière à l’invitation de Julie Valade, Directrice du Département joaillerie d’ARTCURIAL, j’ai enfin réalisé mon fantasme : entrer dans les coulisses d’une salle des ventes prestigieuse pour en découvrir les trésors en avant-première.
« Ma bague ancienne a été portée avant moi et sera portée après moi, mais elle représente un moment unique de ma vie. Nos émotions traversent le bijou de génération en génération, c’est ça qui est passionnant ! »
Julie Valade, directrice du département Joaillerie ARTCURIAL
Julie m’a reçu dans un minuscule boudoir inondé de la lumière du rond-point, là où elle reçoit les vendeurs qui apportent leurs bijoux à expertiser, et les acheteurs désireux de voir la pièce en vrai. Elle m’a expliqué que dans le domaine de la joaillerie, la galerie ARTCURIAL organise deux ventes physiques par an à Monaco et trois ou quatre ventes exclusivement online.
Avec son équipe, elle est en charge de l’expertise des bijoux auprès des vendeurs et de l’organisation de la vente, des prix à la réalisation des photos pour les fiches produits du catalogue.
Les ventes online ont pas mal changé la donne, elles sont très accessibles et ont largement contribué à démocratiser les ventes aux enchères.
Il suffit de se créer un compte sur le site ARTCURIAL pour participer à la vente, d’enchérir sur le, ou les bijoux qu’on aime, sachant que tout se joue à la dernière minute avant la clôture, évidemment ! C’est aussi simple que d’acheter sur Ebay, finalement un jeu d’enfant.
On peut prendre rendez-vous sur place pour voir les pièces en vrai, ou tout simplement demander à la personne en charge de la vente de voir des photos portées sur WhatsApp, comme on peut le faire aujourd’hui auprès de tous les sites prestigieux de ventes en ligne.
Coté prix, j’ai été complètement bluffée par les estimations des bijoux. Normal car mes repères sont ceux du marché neuf dans lequel le prix intègre le coût des matières premières (cours de l’or et du diamant par exemple) et de la façon, mais aussi la cote de la marque, la marge du revendeur, et les phénomènes de mode.
Une bague Boucheron, à qualité équivalente, vaudra beaucoup plus que celle d’un artisan méconnu aussi doué soit-il, et le prix d’ un collier loquet Marie Lichtenberg pulvérisera celui d’une chaine ancienne ornée d’un fermoir similaire vendu en seconde main.
Alors que je me suis amusée à essayer les bijoux qui me plaisaient le plus sous l’œil amusé de l’équipe joaillerie ARTCURIAL (ici le sérieux règne en maitre, les influenceuses délurées de l’ère digitale n’ont pas encore désacralisé les lambris et dorures XIXème du duc de Morny…), j’ai poussé des exclamations extatiques à la découverte des prix de chaque pièce, pour moi ridiculement bas en regard du poids et de la beauté de la pièce.
Julie m’a expliqué que l’estimation est une sorte de prix plancher, une garantie minimum pour le vendeur en même temps qu’un prix attractif pour l’acheteur, sachant qu’au final, le prix de vente sera toujours supérieur.
Mais quoi qu’il en soit, un bijou acheté en salle des ventes est une affaire par rapport au marché du neuf, surtout si le bijou n’est pas convoité par un professionnel ou que vous êtes seul ou peu de particuliers à enchérir, ce qui est souvent le cas.
A titre d’exemple, le solitaire Patek Philippe en platine ornée d’un diamant de 3 carats entouré de 2 diamants tapers pour un poids de 3,30 carats avait été estimé à 1500 € et il a été vendu bien au-dessus à 8450 €, ce qui reste un prix ultra raisonnable quand on connait le prix d’un solitaire neuf orné d’un diamant d’un carat avec une qualité honorable ( autour de 8000 € le carat).
Idem pour la somptueuse gourmette en maillons ovales twistés estimée à 4000 € finalement vendue 6500 €, ce qui n’est même pas sa valeur en poids au prix actuel de l’or !
Ces deux ventes largement plus élevées que leur estimation s’expliquent sans doute par l’envolée actuelle du cours du diamant et de l’or, Julie m’explique qu’on est dans une période où les matériaux précieux sont une valeur refuge face aux crises qui menacent la bourse et l’économie.
A titre d’exemple pour tous ces bijoux qui me faisaient de l’œil :
Les parures boucles d’oreilles ravissantes en or 14k estimées 600 € ont étés vendues 1400 €, ce qui n’est rien quand on connait le prix d’une poissarde chez une jolie de marque de créateur !
Le camée entièrement serti de diamants taille rose estimé à 1000€, un prix dingue compte tenu de la beauté et la rareté de la pièce, est parti à 2860€, une broutille !
La bague cocktail en or orné d’un cabochon d’améthyste et de deux tourmalines estimée à 500 €, vendue 975€, une misère !
La bague marquise ravissante ornée de saphirs ovales estimée à 1000€ et vendue 1170€, rien du tout !
Et les ravissants boutons de manchette intailles en or estimés à 100€ vendues à 585€, une paille !
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Je suis ressortie totalement conquise avec deux pensées contradictoires : 1) mon prochain bijou sera chiné sur une vente aux enchères, 2) l’achat d’un bijou même avec un diamant de belle qualité n’est pas un investissement aussi certain qu’on le croit.
Objection que Julie nuance immédiatement avec l’adage de l’œuf ou la poule, car me dit-elle, un diamant bien acheté et bien vendu garde une valeur presque constante, et elle est justement là pour conseiller ses clients vendeurs et acheteurs pour optimiser leur transaction !
Quand on aime les bijoux, la vente aux enchères est à la fois un jeu qui s’apparente à une chasse au trésor jubilatoire, une passion addictive, une façon de s’offrir de très belles pièces à un prix abordable et une démarche éthique. Ne nous répète-t-on pas à l’envi qu’il faut préserver les ressources de la planète ? La promesse de toutes les marques émergentes n’est-elle pas fondée sur l’éthique ?
Quand je pense à tous ces bijoux ravissants qui ont traversé des décennies voire des siècles et qui sont toujours là, prêt à vivre une nouvelle histoire, franchement, j’en ai des frissons !
La prochaine vente joaillerie ARTCURIAL est programmée du 8 au 15 décembre.
Notez ça dans vos tablettes si vous voulez mettre sous le sapin un bijou somptueux à un prix raisonnable, je me charge de sonner le rappel la veille de la vente, parce que des occasions comme ça, aujourd’hui, on n’a plus aucune excuse de les rater !
Photos Artcurial
Texte et images Sylvie Arkoun