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Category PORTRAIT
Alix D. Reynis, passé sublime & transparence gracieuse

« Pour ma nouvelle collection Intailles, j’ai eu envie de reprendre des symboles universels qui parlent à tout le monde, que ça traverse le temps »

Le passé est un sujet.

Qu’on le veuille ou non, il nous suit à la trace.

Quand j’ai croisé Alix D. Reynis sur le salon Première Classe il y a environ 10 ans, ça ressemblait déjà à un anachronisme. Cette grande blonde hiératique semblait avoir été téléportée d’une époque lointaine dans le hall de la porte de Versailles.  

Au milieu de cette foire aux accessoires bruyamment tendance, ses créations m’ont paru d’un charme délicatement suranné. J’avais admiré sa vitrine vintage de porcelaines blanches et de fins bijoux en vermeil, je me souviens qu’elle m’avait dit deux choses : elle ne se sentait pas à sa place dans ce temple moderne de l’accessoire de mode (moi non plus) et elle avait été notaire dans une vie antérieure (moi pas !).

J’ai vu beaucoup de reconversions dans le monde du bijou, mais une notaire qui passe à la sculpture et la création de bijoux, jamais ! D’autant plus étonnant qu’Alix est aux antipodes de l’image que je me fais de la profession de notaire. Le mien, c’est Mr Bean confit dans sa veste en tweed, le phrasé empoulé de Giscard, et un bureau empire qui sent la naphtaline… le jour et la nuit !

J’ai suivi son parcours au cours des dernières années avec intérêt.

Le développement de son univers autour des arts de la table au Bon Marché, les détails perlés de ses bijoux façonnés à partir de modèles en cire, puis l’ouverture de 2 boutiques parisiennes à son nom et d’une troisième lilloise.

Quand j’ai reçu le mail de son service de communication m’invitant à découvrir sa nouvelle collection Intailles, j’ai bondi sur l’occasion de la revoir pour élucider enfin son mystère.

L’invitation tombait à point nommé, parce que depuis quelques temps, les bijoux anciens et les créations d’inspiration antique reviennent en force.

Les jolies boutiques bijoux vintages fleurissent sur Insta (Isabelle Subra Woolworth, Caillou Paris, Métier Paris, La Collection Noire), la galerie Antique Jewelry Vault raconte les histoires passionnantes de pièces de musées, l’exposition de l’école des arts joailliers nous offre une collection somptueuse de pierres taillées depuis l’antiquité jusqu’au XIXème, les symboles ancestraux ressortent des grimoires pour se graver sur le précieux.

Toute une génération de jeunes créateurs reprennent des techniques et des styles anciens pour se les approprier dans une écriture moderne, légère et désirable.

Alix D. Reynis fait partie de cette génération qui plonge avec délectation dans les trésors du passé.

A mon arrivée dans sa boutique de la rue Jacob, Alix travaillait dans son atelier caché dans l’arrière-cour. Longs cheveux sortie-de-plage, débardeur blanc, jupe de coton champêtre et accumulation de grigris, Alix a l’élégance de la parisienne adulée par le reste du monde, effortless beauty.  

Malgré ce D. aristocratique entrelacé au milieu de son nom et son allure de reine, Alix est une grande fille nature, discrète, une artisan autodidacte qui fait beaucoup de chose elle-même et qui, chose rarissime, ne se la joue pas.

Elle s’est essuyée les mains, a enlevé son tablier, nous a fait visiter, s’est excusée d’un bobo sur le nez (une porte de placard ?) et de sa fatigue (une fiesta la veille ?) avant de nous installer dans la pièce des bijoux nichée tout au fond.

Entre maison de famille, boudoir du XVIIIème, cabinet de curiosité et atelier d’artisan, la boutique est sobre, raffinée, intimiste grâce à un subtil jeu de clair-obscur.

Les murs peints dans un bleu-gris intense font ressortir les reflets nacrés de la céramique et des bas-reliefs en plâtre, les suspensions créent un doux halo lumineux quand les rayons du soleil dardent depuis les fenêtres sur rue, le parquet ancien crisse sous les pas comme dans un vieux manoir.

Avec ma robe rouge coquelicot, j’ai l’impression de faire tache dans son élégant boudoir feutré, mais par miracle, nos nu-pieds sont raccords, et finalement le carmin met en valeur la subtile transparence de ses créations.

Alors que je me jette sur les bagues de pierres fines gravées de ravissants symboles, j’écoute Alix me raconter comment elle s’est passionnée pour la technique de l’intaille :

« J’avais découvert les pierres taillées au musée du Louvre, ils ont une collection fabuleuse de sceaux cylindres en pierre fine de l’antiquité. »

Alix D.Reynis

La technique de la glyptique, littéralement « art de la gravure sur des pierres fines », vient donc de l’antiquité et serait une des premières traces de l’authentification, la signature par sceaux à cire.

Je plonge avec délectation dans ce jeu de pistes ésotérique à la façon d’un roman de Umberto Ecco, spiritualité, symbolique et écriture, c’est un peu l’énigme du « Nom de la Rose » !

C’est au XVIIIème siècle, sous l’impulsion de la marquise de Pompadour, que la glyptique redevient à la mode.

Très prisée au second empire, période où le style antique est au firmament, la pierre gravée en creux (Intaille) ou en volume (Camée) devient un best of de la joaillerie de la fin du XIXème avant de retomber dans l’oubli.  

Alix est immédiatement fascinée par la beauté de cette technique ancestrale.

« J’ai eu envie de reprendre des symboles universels qui parlent à tout le monde, que ça traverse le temps »

 

Avant de créer sa collection, elle a besoin de découvrir, apprendre, faire elle-même.

Sa vocation est avant tout artisanale, tout passe par ses mains, la sculpture de la terre pour la porcelaine, le façonnage d’une cire pour ses bijoux, la gravure de la pierre pour l’intaille.

Après un premier atelier à l’IMA où elle découvre les sceaux cylindre et la technique d’écriture sur l’argile, elle décide de suivre des cours avec un artisan lapidaire-glypticien qui lui enseigne les bases.  

« C’est un travail extrêmement long, précis, minutieux. Je sais faire mais je suis lente ! J’ai trouvé les meilleurs artisans en France et en Allemagne pour réaliser ma collection ! »

Alix D.Reynis

Elle m’explique que le glypticien travaille avec des binoculaires, des outils miniatures, et de la poudre de diamants, seul matériaux qui peut attaquer la pierre.

Gauchère, impatiente, maladroite comme moi, glyptique s’abstenir !

Il faut une patience de sioux, un œil de lynx et une minutie de psychopathe pour réaliser cette bague ornée d’un cristal de roche à la transparence gracieuse ou ce grenat au rouge velouté.

Parce que toute la subtilité de l’intaille est là.

Pas de clinquant aveuglant, pas de bling ostentatoire, la pierre polie joue délicatement avec les reflets de la lumière, laissant alternativement apparaitre le cœur gravé ou l’eau profonde de la pierre.

L’intaille est à la joaillerie ce que la photo argentique est à la photo numérique, une technique ancienne, complexe et périmée en passe de redevenir un art grâce à la beauté que permet ses nuances infinies.

J’essaye toutes les bagues et les pendentifs de la collection qui se décline autour de 7 symboles éternels, Abdelha (l’abeille), Amore (l’amouuur), Ares (l’étoile à 8 branches), Fede (la croix), Memento (la mémoire), Minerve (la déesse)  et 4 pierres précieuses, le grenat, le cristal de roche, la cornaline et la tourmaline noire. 

 Alix m’explique que chaque Intaille est polie et gravée avant de venir s’enchâsser parfaitement sur sa monture perlée en or, c’est presque du sur-mesure.

Elle précise que chaque cliente pourra associer la pierre au symbole de son choix pour un bijou signature.

Finalement, la signature, la trace, n’est-ce pas la vocation première de l’Intaille ? Et si c’était là que se nichait la clé de l’énigme d’Alix D. Reynis ?

« Beaucoup de choses dans mon histoire expliquent le besoin de transmettre. Le lien dans tout ça, c’est la trace, la transmission ! »

Alix D.Reynis

Je comprends entre les lignes qu’avec toute une généalogie d’ancêtres notaires plus un mari de la même profession, le combat d’Alix a été de faire muter l’atavisme familial en élan créatif.

Et alors que je fais avec elle le tour de ses vitrines où les bas- reliefs faits-maison servent de décor aux bijoux, je remarque la belle médaille ornée d’un blason perlé qu’elle porte autour du cou. Non, ce n’est pas une de ses créations, mais une médaille de la maison Canale, l’adresse de l’orfèvre le plus secret, le plus ancien et le plus prestigieux de l’Ile Saint-Louis.

« Je pense que ça vient de là mon inspiration de bijoux ! C’est si rare… d’ailleurs, l’autre jour j’ai croisé dans la rue une dame qui portait une médaille de la même maison, on s’est tout de suite reconnues ! ».

J’ai laissé avec regret sur le plateau de velours noir les bagues gravées du cœur couronné, de la déesse Minerve et de l’abeille royale.

Qui n’a pas envie de se reconnaitre autour des symboles de l’amour éternel, de la confiance en soi et de la puissance royale ?  

La collection Intailles est à découvrir d’urgence dès fin septembre dans les trois boutiques de d’Alix D. Reynis, parce que porter ses bijoux à la gracieuse transparence et au passé sublime, c’est encore plus beau qu’une signature, c’est un privilège !

 

Photos Delphine Jouandeau

Texte Sylvie Arkoun

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